Discours du surintendant Peter Routledge, webémission du BSIF sur la gestion du risque, 5 juin 2023

Discours -

Le texte prononcé fait foi

Bonjour à tous. C’est un plaisir d’être ici. Je vous parle depuis mon bureau à Ottawa.

Le BSIF est en cours de transformation pour s’assurer d’être un organisme de réglementation plus efficace dans un environnement de risque très, très complexe.

L’une des stratégies que nous avons choisies est la transparence. Nous faisons preuve de transparence avec le grand public et avec les institutions financières fédérales et leurs associations sectorielles afin d’être clairs et de lever les incertitudes sur la manière dont nous, en tant qu’organisme de réglementation, pourrions agir dans des environnements de risques anodins, hostiles ou, comme aujourd’hui, quelque peu incertains.

Merci à tous d’être avec nous aujourd’hui. Nous avons l’intention d’accroitre notre transparence pour les institutions financières sur règlementations fédérales du Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) . Grâce à cette diffusion nous avons un excellent ordre du jour et nous espérons expliquer le projet du BSIF pour les prochaines années.

Avant de commencer, j’ai pensé qu’il serait bon que je me décrive pour les personnes souffrant d’un handicap visuel. Je suis un homme blanc. Je mesure un mètre soixante-quinze et j’ai les cheveux bruns courts. Mes pronoms sont « il » et « lui ». Je porte une chemise blanche, un veston bleu et une cravate grise.

Je vais maintenant prendre quelques instants pour définir le contexte dans lequel nous opérons en tant qu’organisme de réglementation et celui dans lequel vous exercez vos activités en tant qu’institutions financières. Je veux expliquer ce que nous faisons et préciser nos priorités en matière de surveillance. J’aimerais parler brièvement de notre énoncé de la propension à prendre des risques, puis enchaîner avec un projet fascinant en cours, à savoir un nouveau cadre de surveillance qui entrera en vigueur le 1er avril 2024. Je vous donnerai ensuite un aperçu des autres points à l’ordre du jour.

Ces derniers mois, nous avons assisté à la faillite de quatre banques régionales américaines d’assez bonne taille et à la quasi-faillite puis au rachat d’une banque d’importance systémique mondiale. Il s’agit de la première résolution bancaire de ce type, si je puis dire, d’une banque d’importance systémique mondiale depuis la grande crise financière de 2008 et 2009.

Naturellement, lorsque des événements de ce type se produisent sur les marchés financiers, cela crée de l’incertitude et de la peur. Les observateurs se demandent alors a) si les institutions et un système bancaire donné sont sains et b) ce que pourrait faire l’organisme de réglementation pour s’adapter à ce qui pourrait être l’émergence d’une situation de crise.

Je reviendrai plus en détail sur notre réaction devant cet état de choses lorsque je parlerai de notre propension à prendre des risques, mais ce que je voudrais dire, c’est que dans l’ensemble, le système financier canadien et ses acteurs ont passé les 15 dernières années à mettre en place des marges de sécurité en ce qui concerne les fonds propres, les liquidités ainsi que la sécurité et l’intégrité de leurs institutions.

Bien qu’il y ait une incertitude naturelle face à ce qui se passera dans l’économie et la manière dont cela pourrait toucher individuellement les acteurs du système financier, je tiens à dire que je suis relativement confiant puisque les institutions du système financier canadien ont de très bonnes réserves ou marges de sécurité qui nous serviront bien pendant que nous traverserons une ou deux années d’incertitude économique peut-être plus importante.

L’inflation qui est réapparue au cours de la dernière année et demie a été un choc. Les taux d’intérêt nécessaires pour lutter contre l’inflation ont également posé des défis à notre système financier, mais jusqu’à présent, ce dernier s’est bien adapté à ces changements, et nous pensons que l’année écoulée est un bon prologue à ce qui suivra. Nous pensons que nos institutions financières parviendront à traverser cette période et que le système financier canadien fera preuve d’un niveau de résilience relativement responsable dans l’ensemble.

Afin de contribuer à cette résilience, nous avons entrepris l’année dernière la publication d’un rapport que nous appelons Regard annuel sur le risque. Ce document présente les risques qui nous préoccupent, les mesures que nous prenons face à ceux-ci en tant que surveillants, et les politiques réglementaires que nous pourrions modifier ou mettre en place pour nous adapter à ces risques.

Vous le trouverez facilement en saisissant « Regard annuel du BSIF sur les risques » sur Google. Les trois risques qui à notre avis sont les plus à surveiller sont le repli du marché du logement, le risque de liquidité et de financement, et le risque lié à l’immobilier commercial. Ce sont là les trois grands thèmes sur lesquels nous nous penchons de plus près. Il y en a six autres : le risque de contagion depuis le secteur de l’intermédiation financière non bancaire, le risque lié aux prêts commerciaux et aux prêts aux grandes entreprises, le risque lié à l’innovation numérique, le risque climatique, le cyberrisque et le risque lié aux tiers.

Cette année, nous les avons intentionnellement classés par ordre d’importance, de sorte que si vous vous demandez ce qui nous préoccupe le plus, il est facile de le voir. Nous avons mis en place des plans de surveillance et de réglementation pour faire face à ces risques.

Nous avons publié ce document en avril. Vous pouvez tous le lire et comprendre ce qui nous occupe et ce sur quoi nous travaillons. Nous espérons que ce document sera utile et souhaitons savoir comment nous pouvons l’améliorer, car il vise à faciliter les choses pour les institutions que nous réglementons.

En ce qui concerne nos activités de surveillance, qui, j’en suis sûr, intéressent tout le monde, je voudrais prendre une minute pour insister à nouveau sur l’importance que nous accordons à ce que nous appelons les 4 C en anglais : capital, cash, credit et contingency (donc les fonds propres, les liquidités, le crédit et les mesures d’urgence). Ce sont les principes de base d’un système financier sain.

Quand on parle de fonds propres, nous insistons sur la nécessité pour les institutions financières fédérales de dégager à même leur assise financière d’importantes marges de sécurité afin de gérer l’incertitude, en particulier en période de ralentissement économique.

En ce qui concerne les liquidités, nous demandons aux institutions financières fédérales, que j’appellerai ici IFF, de s’assurer qu’elles disposent de réserves de liquidités suffisantes pour faire face à des retraits inattendus de liquidités. Il peut s’agir de retraits sur dépôt, d’appels de marge ou d’appels de garantie. Nous demandons aux institutions d’être un peu plus prudentes à cet égard.

En ce qui concerne le crédit, nous demandons aux IFF d’évaluer soigneusement leurs risques de crédit et peut-être même d’être un peu plus prudentes au cours des 12 à 18 prochains mois pour s’assurer que les contreparties peuvent respecter leurs obligations envers elles, et, dans le cas contraire, veiller à ce que leurs provisions soient revues en fonction des pertes potentielles.

Enfin, nous demandons aux IFF d’élaborer des plans d’urgence pour affronter non seulement les risques financiers, mais aussi les divers risques non financiers, tels que le cyberrisque, le risque lié à l’innovation numérique ou le risque lié aux tiers.

Il s’agit des meilleures pratiques que les IFF doivent continuellement mettre de l’avant.

J’aimerais maintenant parler de l’énoncé de la propension à prendre des risques du BSIF que nous avons publié en mai. À notre avis, cet énoncé nous aide à expliquer de manière transparente comment le BSIF prend ses décisions en période d’incertitude. Je vais lire l’énoncé de la propension à prendre des risques et en parlerai ensuite.

Au BSIF, nous sommes très enclins à intervenir rapidement pour gérer les risques susceptibles d’ébranler la confiance du public à l’égard de la solidité du système financier canadien. Nous sommes aussi bien conscients du fait qu’il n’est ni rentable ni réaliste d’agir face à tous les risques pesant sur les institutions et les régimes de retraite que nous réglementons. Par conséquent, nous sommes disposés à accepter la faillite ordonnée d’une institution réglementée, mais notre propension à prendre des risques est faible dans l’éventualité d’une faillite qui nous prendrait de court.

Surtout, le BSIF est prêt à agir rapidement et de manière décisive lorsque des faiblesses du système financier ou des acteurs peu solides se manifestent. Nous préférons être critiqués pour avoir agi un peu trop tôt plutôt que de voir l’économie subir les répercussions d’une intervention trop tardive de l’organisme de surveillance des institutions financières. Nous pensons que l’histoire du système financier regorge d’exemples où les organismes de surveillance ont agi un peu trop tard et où les économies ont dû supporter des coûts plus élevés qu’elles ne l’auraient fait autrement.

C’est ce que nous ferons pour répondre aux faiblesses du système financier, et nous sommes prêts à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que cette propension à prendre des risques soit la plus claire et la plus transparente possible pour chacun d’entre vous.

Conformément à notre nouvelle propension à prendre des risques, nous mettons en place un nouveau cadre de surveillance. Il s’agit d’une première révision en bonne et due forme depuis le tournant des années 2000. On peut parler ici d’une actualisation complète. Le cadre comprendra, entre autres, de nouveaux critères afin de permettre une plus grande différenciation des cotes de risque. Pour l’instant, nous avons le stade 0, qui est en quelque sorte le niveau espéré, c’est-à-dire celui où nous n’intervenons pas. Viennent ensuite les stades 1, 2, 3 et 4, selon un ordre croissant de la gravité de la crise.

Le problème est que la grande majorité de nos institutions en sont au stade 0 et qu’il est actuellement très difficile pour elles de comprendre où elles se situent dans cette catégorie. Nous aurons donc une nouvelle échelle de classement sur 8 niveaux ou stades, où les stades 1, 2, 3 et 4 ne nécessiteront pas d’intervention (1 étant mieux que 4). Suivront les stades 5, 6, 7 et 8, et ces derniers impliquent des interventions.

En outre, nous aurons une cote de risque global qui remplacera la cote de risque composite. Ce n’est pas tout. Nous communiquerons également des cotes à l’égard de quatre autres catégories : le risque d’exploitation, la résilience financière, la résilience opérationnelle et la gouvernance du risque.

Dans le courant de l’année, vous entendrez parler davantage de ce cadre. Nous serons disponibles pour répondre aux questions des membres des conseils d’administration et des dirigeants de nos IFF qui souhaiteraient en savoir plus sur son fonctionnement général et sur la manière dont il pourrait s’appliquer à eux.

Il s’agit d’un changement très important dans la manière dont nous allons exercer notre surveillance. Nos opinions et le raisonnement qui les sous-tend seront beaucoup plus transparents pour chacune de vos institutions. En outre, et c’est un avantage pour vous tous, cela nous rendra plus responsables quant à la justification et à l’explication de nos thèmes de surveillance. Et comme nous nous sentirons plus responsables de ces thèmes de surveillance, ils gagneront en qualité au fur et à mesure que nous progresserons. Nos discussions sur la surveillance seront ainsi plus riches à tous les niveaux.

Ce sont les résultats que nous visons. Nous assumons plus de responsabilités, nous voulons plus de transparence et nous souhaitons des conversations plus riches avec vos institutions. Voilà pourquoi le cadre est ainsi conçu.

Nous visons également la proportionnalité. Toutes les institutions n’ont pas le même profil de risque, la même taille, la même complexité opérationnelle. Ce cadre est censé tenir compte de la proportionnalité.

Pour le reste de la journée, mes collègues vont donc discuter de plusieurs sujets très importants. En tête de liste, le projet de loi C-47, la loi d’exécution du budget, qui propose des modifications au mandat du BSIF. Je tiens à préciser d’emblée qu’il n’a pas encore reçu la sanction royale, mais nous estimons qu’il est suffisamment avancé pour que nous puissions expliquer quelles seraient les implications s’il obtenait la sanction royale. Nous parlerons du renouvellement de l’architecture des politiques, qui s’accordera parfaitement avec ce que pourrait contenir le projet de loi C-47; nous aborderons les thèmes de l’innovation numérique, la résilience opérationnelle, la technologie, la cyberrésilience et le risque climatique, et nous ferons le tour d’enjeux importants comme les fonds propres, le risque de crédit, la réassurance, la norme internationale d’information financière 17 (IFRS 17) et les liquidités.

Ainsi, et j’espère que cela vous a paru évident, le BSIF restera vigilant. Nous prendrons des mesures rapides et décisives, au besoin. Nous ferons de la transparence à votre égard et à l’égard du grand public une priorité. Nous croyons qu’en nous y prenant comme il faut, nous contribuerons à la confiance du public dans le système financier canadien. Notre objectif est de fournir des renseignements clairs sur les risques que nous percevons et d’écouter les commentaires des personnes qui ne sont pas d’accord avec notre vision de ces risques ou notre point de vue à leur égard.

Je vous remercie de votre présence aujourd’hui et je remercie tous les membres de l’équipe du BSIF qui ont travaillé fort pour organiser cette webémission.

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