Peter Routledge, surintendant Table ronde virtuelle à l’occasion du lancement du Compendium Starling Insights

Discours - virtuelle -

Modérateur :

Plus d’un an s’est écoulé depuis la crise de la Silicon Valley Bank (SVB). Quels sont les points essentiels à retenir? Votre perception de la façon dont le BSIF a géré cette crise a-t-elle changé? Avec le recul, feriez-vous les choses différemment?

Surintendant Peter Routledge :

  • Le défi auquel nous sommes confrontés est que l’environnement de risque est de plus en plus complexe, instable et incertain; et la tendance n’est pas près de s’inverser.
  • Le 12 mars 2023, le BSIF a pris le contrôle des actifs de la succursale canadienne de la Silicon Valley Bank après la fermeture de la banque mère par les autorités américaines. Cette mesure décisive a été suivie d’un processus de restructuration sous supervision judiciaire, de manière à protéger les intérêts des créanciers canadiens. À l’époque, j’estimais que cette approche, élaborée en concertation avec les autorités américaines, était dans l’intérêt des créanciers de la succursale. Je reste convaincu aujourd’hui qu’il s’agissait de la meilleure mesure à prendre.
  • La principale leçon que nous avons tirée de la dernière crise financière est que plus l’organisme de surveillance agit tôt, plus les institutions qu’il surveille réagissent tôt face à des risques très importants, et mieux se portent tous les acteurs. Le BSIF étant un organisme de réglementation qui agit en amont, je crois que la prise de mesures rapides et décisives est toujours préférable. Nous sommes de fait très enclins à intervenir rapidement pour gérer les risques susceptibles d’ébranler la confiance du public quant à la solidité du système financier canadien.
  • Nous sommes toutefois bien conscients du fait qu’il n’est ni rentable ni réaliste d’agir face à tous les risques qui pèsent sur les institutions et les régimes de retraite que nous réglementons. C’est pourquoi nous avons adapté notre nouveau Cadre de surveillance pour tenir compte de la diversité des approches de surveillance que nous adoptons à l’égard des institutions financières. Le nouveau Cadre prévoit notamment l’attribution d’une classe pour pouvoir adapter l’étendue des activités de surveillance à l’environnement de risque particulier de chaque institution.

Modérateur :

Ces dernières années, le BSIF a accordé plus d’attention aux risques non financiers (ligne directrice sur les risques liés à la culture et au comportement, ligne directrice sur l’intégrité et la sécurité). L’inclusion de risques non financiers est-elle plus difficile à faire accepter par les institutions que vous réglementez? Montrent-elles une résistance? Comment faites-vous pour convaincre ces institutions de l’importance des risques non financiers?

Surintendant Peter Routledge :

  • Si les risques financiers restent au centre de nos préoccupations, nous sommes également conscients que les risques non financiers (culture, cybersécurité, climat, intégrité et sécurité) sont de plus en plus répandus et que, sans mesures d’atténuation, ils pourraient donner lieu à des risques financiers.
  • Jusqu’à l’an dernier, le BSIF envisageait le risque financier et le risque non financier de manière distincte et inégale. Nous avions tendance à qualifier le risque financier de « prudentiel » et le risque non financier, de « non prudentiel ».
  • Après la crise de la SVB, notre mandat a été révisé dans le cadre du budget de 2023 pour veiller à ce que les institutions financières fédérales gèrent les risques qui pèsent sur leur intégrité et leur sécurité de manière responsable. Or, cela n’était pas tout à fait nouveau pour nous. En effet, le BSIF a beaucoup travaillé sur les questions d’intégrité et de sécurité ces dix dernières années. Le régime d’intégrité et de sécurité que nous mettons en place constitue en fait un repositionnement de nos activités de surveillance et de réglementation qui s’est amorcé dans la foulée de la crise financière mondiale de 2008‑2009. Par exemple, d’autres lignes directrices énoncent d’ores et déjà des attentes à l’égard de l’évaluation des antécédents, et de la gestion du risque lié aux technologies et du cyberrisque.
  • Pour ce qui est de la résistance, les institutions financières fédérales ont vu par elles-mêmes comment les risques non financiers se traduisent par des risques financiers.
  • La culture peut par exemple influer sur le bien-fondé des décisions prises, sur la prudence en matière de prise de risque et sur l’efficacité de la gestion du risque, ce qui peut sensiblement favoriser ou réduire la résilience des institutions financières fédérales.
    • Le BSIF s’attend à ce que les institutions financières fédérales :
      • définissent une culture souhaitée, puis la développent et l’améliorent continuellement pour qu’elle contribue à l’atteinte de leur objectif, à la réalisation de leur stratégie, à une gestion efficace des risques et à leur résilience;
      • évaluent en permanence les risques liés au comportement pouvant nuire à leur sûreté et à leur solidité globales et prennent les mesures nécessaires pour y faire face.
    • Soulignons que nous publierons la version finale de notre ligne directrice sur les risques liés à la culture et au comportement au quatrième trimestre de 2024.

Modérateur :

Comment collaborez-vous avec vos homologues internationaux pour assurer la cohérence à l’échelle mondiale?

Surintendant Peter Routledge :

  • Lorsqu’il est question d’élaborer des approches de réglementation pour le Canada, nous participons aux activités pilotées par divers organismes internationaux de normalisation, notamment le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB), le Conseil de stabilité financière (CSF) et l’Association internationale des contrôleurs d’assurance (AICA), pour n’en citer que quelques-uns.
  • Une fois les normes internationales élaborées, nous prenons note de la façon dont elles sont adoptées par d’autres pays, en particulier ceux où les institutions financières que nous réglementons peuvent exercer des activités.
  • Si l’harmonisation des exigences réglementaires bénéficie aux institutions financières, notre travail consiste à examiner ces normes et à nous demander ce qui se justifie dans le contexte canadien. Pour ce faire, nous étudions attentivement le risque qui, selon nous, est visé par la norme internationale, mais aussi les répercussions qu’elle aurait sur la capacité des institutions financières à se mesurer à la concurrence et à prendre des risques raisonnables.