Tolga Yalkin, participe à la 30e conférence annuelle sur la conformité des institutions financières à la réglementation
Discours - Toronto -
Introduction
Bonjour tout le monde.
C’est un honneur de me joindre à vous aujourd’hui à l’occasion de cette 30e conférence annuelle sur la conformité des institutions financières à la réglementation. Cette étape importante nous donne l’occasion de célébrer les professionnels qui s’engagent à ce que nos institutions financières fonctionnent de façon sécuritaire, saine et intègre.
Avant de commencer, je tiens à souligner que nous sommes réunis aujourd’hui sur le territoire traditionnel de la Première Nation Mississauga de Credit, ainsi que des peuples Anishinaabé, Chippewa, Haudenosaunee et Wendat. Ce territoire est aussi le foyer de nombreux peuples des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
Passons maintenant au sujet de mon allocution d’aujourd’hui, soit la gestion de la conformité à la réglementation (CGR) et son importance sans cesse croissante dans l’environnement de risque de plus en plus complexe d’aujourd’hui.
La gestion du risque de non-conformité à la réglementation, c’est-à-dire la non-conformité aux lois, aux règles et aux exigences, a toujours été essentielle au maintien de la sûreté et de la solidité des institutions financières. Aujourd’hui, cependant, les enjeux sont plus élevés que jamais, car le secteur financier fait actuellement face à un environnement de risque en évolution rapide et de plus en plus complexe.
L’évolution du paysage du risque
Ces changements ont fait en sorte qu’il est beaucoup plus difficile pour les institutions de respecter les exigences réglementaires, car elles font face à une complexité et à une incertitude grandissantes.
En même temps, les conséquences du non-respect des exigences réglementaires deviennent de plus en plus graves.
Les banques canadiennes, tant au pays qu’à l’étranger, ont dû payer des amendes de plusieurs millions et parfois de plusieurs milliards de dollars pour des lacunes dans les programmes de conformité en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Ces manquements ont entraîné de lourdes sanctions pécuniaires, des atteintes à la réputation et une surveillance réglementaire accrue.
À l’étranger, plusieurs grandes banques d’envergure mondiale ont été condamnées à payer des milliards de dollars pour ne pas avoir réussi à prévenir les crimes financiers, y compris le blanchiment d’argent et les manquements vis-à-vis des sanctions. Ces cas mettent en évidence les conséquences généralisées du non-respect des attentes réglementaires. Ces conséquences menacent la stabilité des institutions, érodent la confiance du public et incitent à une surveillance plus stricte dans toutes les administrations.
Ces exemples ne sont pas des incidents isolés. Ils montrent bien une tendance croissante vers une surveillance réglementaire accrue et vers l’augmentation des sanctions pour non-conformité à la réglementation.
Il en ressort clairement qu’une solide gestion de la conformité à la réglementation n’est pas seulement une attente réglementaire, il s’agit d’un impératif opérationnel. Les institutions financières qui ne répondent pas à ces attentes mettent en péril leur sécurité et leur solidité.
Conformité à la réglementation : fondement de la sûreté et de la solidité
Au Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF), nous reconnaissons que la conformité d’une institution financière aux exigences réglementaires est fondamentale pour sa sûreté et sa solidité. Cela va au-delà des indicateurs financiers tels que les fonds propres, la liquidité et les leviers. Cela témoigne de la nécessité plus générale pour les institutions de veiller au respect des exigences prudentielles et à d’autres exigences réglementaires au Canada et dans le monde.
Notre nouveau mandat élargi en matière d’intégrité et de sécurité souligne également l’importance des exigences réglementaires. Lorsque nous examinons les risques, tels que ceux associés à la gestion de la conformité à la réglementation, nous ne nous limitons plus à les considérer uniquement sous l’angle de la sécurité et de la solidité. Maintenant, nous pouvons également les considérer comme des questions d’intégrité à part entière.
Le non-respect des dispositions réglementaires peut ébranler la stabilité d’une institution financière de plusieurs façons :
- Sanctions pécuniaires : Des amendes importantes peuvent éroder le capital et la rentabilité.
- Perturbations opérationnelles : L’application de mesures coercitives exige souvent des mesures correctives coûteuses et chronophages.
- Atteinte à la réputation : Les échecs médiatisés nuisent à la confiance avec les clients, les investisseurs et les contreparties.
- Surveillance réglementaire accrue : Les institutions présentant des lacunes en matière de conformité peuvent faire face à des restrictions ou à une surveillance accrue, ce qui limite leur capacité à être concurrentielles et à croître.
En bref, la non-conformité n’entraîne pas seulement des conséquences réglementaires, elle ébranle la stabilité même de l’institution.
La complexité croissante de la conformité
Ajoutons à cela que la complexité de la conformité à la réglementation a considérablement augmenté au cours des dernières années, en raison de plusieurs facteurs :
- Mondialisation : Les institutions financières exercent leurs activités dans plusieurs administrations, chacune ayant ses propres cadres réglementaires et ses propres attentes.
- Élargissement des exigences réglementaires : À mesure que les risques évoluent, les règles régissant les institutions financières évoluent également.
- Interdépendance : Les institutions doivent naviguer dans des relations de plus en plus complexes avec des tiers, des clients et des contreparties, qui ont toutes des ramifications en matière de conformité.
- Rythme d’évolution du risque : La vitesse à laquelle les risques se matérialisent a augmenté, ce qui oblige les institutions à réagir rapidement et efficacement.
Ces facteurs ont rendu la gestion du risque de non-conformité plus difficile et plus essentiel que jamais. Après des décennies de stabilité économique et financière relative, les institutions sont maintenant confrontées à un environnement plus turbulent marqué par des changements géopolitiques, des changements technologiques rapides et une volatilité accrue des marchés. Cela a augmenté les enjeux de conformité, car la prévisibilité des cadres antérieurs laisse place à un besoin d’agilité dans la gestion des risques. Les institutions doivent être proactives dans la détermination et la gestion des risques de non-conformité afin d’éviter d’être prises au dépourvu.
Analogie avec le navire
Les défis de bien accomplir ce qui doit être fait sont évidents et clairs. Et pour plusieurs, il existe un défi supplémentaire : la gestion de la conformité à la réglementation peut souvent sembler abstraite étant donné qu’elle se concentre sur l’établissement de systèmes et de processus pour prévenir les infractions aux règles et aux règlements, plutôt que de résoudre les problèmes visibles ou immédiats.
De plus, son succès passe souvent inaperçu car, lorsqu’elle s’avère efficace, tout se passe bien. Ce caractère préventif et en coulisses de la gestion de la conformité à la réglementation rend plus difficile de la visualiser et de s’y rallier par rapport aux actions concrètes ou aux crises.
De plus, l’accent mis sur le respect des cadres réglementaires détaillés et souvent complexes peut sembler technique et bien lointain des opérations quotidiennes ou des résultats que les gens comprennent facilement.
Pour rendre ce concept plus accessible et plus facile à comprendre, j’aime utiliser l’analogie d’un navire naviguant en haute mer.
La GCR est en quelque sorte le système de guidage d’un navire : il garde celui-ci sur la bonne voie, il permet d’éviter les dangers et d’arriver à bon port en toute sécurité. Les exigences et les cadres réglementaires, quant à eux, sont comme les règles de divers ports, chacun avec des directives particulières pour l’entrée au bassin, les douanes et la manutention des marchandises. Un navire doit se conformer à ces règles pour opérer correctement à chaque arrêt.
Lorsque le système de guidage est mal entretenu, même de petits défauts, comme un léger défaut de calibration, peuvent faire dériver le navire. Cette dérive pourrait entraîner des retards sur les échéances, des infractions aux règles portuaires ou même un refus d’entrée. Avec le temps, de telles lacunes dans la navigation affaiblissent la relation de confiance avec les ports et compromettent la capacité du navire à terminer ses voyages.
Arriver à un nouveau port avec des règles inconnues ajoute un autre niveau de complexité. Sans un système de guidage robuste, l’équipage du navire a du mal à s’adapter, ce qui augmente le risque d’erreurs et d’infractions à la réglementation. En revanche, un cadre de GCR solide permet au navire d’interpréter les nouvelles exigences, d’ajuster efficacement les opérations et ainsi de maintenir le cap.
Le pavillon et le port d’attache d’un navire servent également de signaux importants. Les navires immatriculés dans les pays dotés de systèmes de réglementation solides bénéficient d’une crédibilité accrue, d’opérations plus sûres et de meilleures interactions avec les ports, les organismes de réglementation et d’autres navires. Ces normes élevées favorisent la confiance et réduisent les risques, créant ainsi des avantages pour le navire.
C’est pourquoi, en tant qu’organisme de réglementation, nous accordons une telle importance à la gestion de la conformité à la réglementation, non seulement pour les institutions individuelles, mais aussi pour la réputation du Canada dans son ensemble. Toutes les institutions financières y voient le même intérêt, car la force de « l’image de marque du Canada » renforce la confiance dans notre système financier et appuie son succès à l’échelle mondiale.
La leçon est claire : les lacunes dans la gestion de la conformité sont au cœur de la capacité d’une institution à fonctionner en toute sûreté et solidité. Si rien n’est fait, ces lacunes peuvent entraîner des infractions à la réglementation, des atteintes à la réputation et des perturbations opérationnelles, menaçant non seulement la stabilité à long terme d’une institution, mais aussi la confiance et la crédibilité plus généralisées qui sont à la base de notre système financier.
Tout comme les défaillances d’un navire peuvent nuire à la sécurité et aux opérations de l’ensemble de la flotte, la faible conformité d’une institution peut avoir un effet d’entraînement, ce qui a une incidence sur notre réputation nationale et sur la résilience de l’écosystème financier dans son ensemble.
À quoi ressemble une gestion efficace de la conformité
Pour qu’un navire puisse opérer en toute sécurité, son capitaine, son équipage et son système de guidage doivent travailler ensemble pour éviter les dangers et s’adapter aux conditions changeantes. De même, une gestion efficace de la conformité nécessite ce qui suit :
- Gouvernance claire : Les conseils d’administration et la haute direction doivent agir comme le capitaine du navire, en établissant un parcours clair et en veillant à ce que les risques de non-conformité soient bien gérés.
- Cadres solides : Tout comme des cartes précises guident la navigation, les cadres de conformité doivent être régulièrement mis à jour pour tenir compte des risques émergents.
- Surveillance proactive : Les instruments d’un navire sont régulièrement mis à l’essai pour le maintenir sur sa trajectoire; de même, les cadres de conformité devraient être continuellement renforcés pour maintenir la stabilité institutionnelle.
Le dirigeant principal de la conformité joue le rôle de navigateur, il guide les institutions en toute sécurité dans l’environnement réglementaire complexe d’aujourd’hui. Il :
- repère et traite rapidement les cas de non-conformité, on peut dire qu'il relève les dangers avant qu’ils ne se transforment en crises;
- favorise une culture de vigilance, en veillant à ce que l’institution ne se laisse pas aller à la complaisance, parce qu’un équipage bien préparé peut anticiper les défis.
Cependant, aucun navigateur ne peut diriger un navire seul. La conformité nécessite une collaboration entre la haute direction, le conseil d’administration et l’ensemble de l’organisation, en travaillant comme un équipage cohésif.
La voie à suivre : établir, repérer, empêcher
Ce travail n’est pas de tout repos, nous y pensons souvent en tant qu’organisme de réglementation. Bien que cette complexité demande une réponse importante et complète, nous avons élaboré un point de référence utile pour aider les institutions financières à se rappeler des aspects qu’elles doivent cerner.
Il est important de se rappeler l’approche « établir, repérer, empêcher ». Qu’entendons-nous par ceci exactement?
- Établir : Élaborer et mettre en œuvre des contrôles et des politiques clairs et robustes pour assurer le respect de toutes les exigences réglementaires applicables.
- Repérer : Repérer rapidement les risques et les manquements de conformité de manière proactive grâce à une surveillance continue, à des audits et à des évaluations des risques.
- Empêcher : Empêcher les problèmes de s’aggraver en s’attaquant rapidement aux lacunes relevées et en renforçant les contrôles pour atténuer les risques futurs.
Conclusion
En terminant, j’aimerais revenir brièvement à l’analogie du navire. Nous voulons tous naviguer sur des navires en état de navigabilité, bien guidés et préparés pour le voyage à venir. Le même principe s’applique aux institutions financières. Une solide gestion de la conformité permet non seulement à l’institution de garder le cap, mais aussi de tracer la voie vers la stabilité et la résilience.
Comme le dit le dicton, un navire amarré au port ne court aucun danger, mais ce n’est pas à cela que sert un navire. Avec des systèmes de conformité robustes en place, les institutions financières peuvent naviguer dans les eaux les plus tumultueuses, c’est-à-dire qu’elles peuvent accomplir leur mission tout en préservant la confiance et la stabilité pour tous.
Merci. Je vais maintenant répondre à vos questions.