Séance d’information du BSIF de 2022 sur la gestion du risque à l’intention des sociétés d’assurance
Discours - Événement virtuel -
Mot d’ouverture de Peter Routledge, surintendant
Merci de participer à notre première séance d’information sur la gestion du risque s’adressant à la fois aux assureurs vie et aux assureurs multirisques.
Comme le veut maintenant la tradition, j’aimerais préciser – et j’encourage les autres à faire de même – que je vous parle depuis le territoire traditionnel non cédé des peuples des Premières Nations Anishnabeg et Algonquines. Je tiens à remercier toutes les générations qui ont pris soin de ce territoire. Certains parmi vous travaillent peut-être sur un autre territoire traditionnel autochtone ailleurs au pays. Je le mentionne, car je crois que la reconnaissance et la réconciliation avec les peuples autochtones sont des concepts importants que tous les Canadiens devraient comprendre. La guérison de ces blessures et l’édification de notre nation en dépendent. Dans cette optique, je vous recommande la lecture du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation du Canada.
Aujourd’hui, nous nous pencherons sur les risques communs dans l’ensemble du secteur. En fait, ces risques touchent non seulement l’économie du Canada, mais aussi l’économie à l’échelle mondiale.
L’origine de bon nombre des enjeux que nous abordons aujourd’hui se situe à l’extérieur du secteur de l’assurance et même à l’extérieur du secteur financier, mais ce sont des risques qui nécessitent notre attention, une mobilisation et la prise de mesures. Vous en apprendrez plus sur les risques que nous constatons et les mesures que nous prenons pour y remédier.
Je sais que les changements auxquels nous sommes confrontés peuvent être intimidants, voire accablants, mais nous sommes toujours mieux placés pour prendre de bonnes décisions lorsque nous communiquons directement avec le secteur.
Avant même l’apparition des pressions économiques liées à la COVID, les expositions croissantes aux risques non financiers menaçaient l’avenir de l’assurance.
Ces risques n’ont pas disparu et, dans certains cas, se sont intensifiés au cours des deux dernières années. Nous avons adapté notre approche face au public afin d’être plus transparents à l’égard de nos priorités en matière de risques, tout en demeurant souples par rapport aux éventuels changements dans le paysage du risque.
Nous avons rendu publics notre plan directeur, notre plan stratégique, notre restructuration et notre rapport intitulé Regard annuel sur le risque afin de contribuer à une approche plus transparente et plus prévisible pour mobiliser le secteur au sujet des risques importants. Cette fonction assurera une meilleure coordination prospective de la mobilisation du secteur.
Nous vous en reparlerons plus tard, mais notre rapport intitulé Regard annuel sur le risque présente notre vision prospective des risques les plus importants auxquels font face les institutions financières fédérales et les régimes de retraite privés pour l’exercice 2022-2023. Les risques que nous avons relevés ne devraient pas causer de surprises et figurent probablement sur vos listes.
Il s’agit d’une orientation. Évidemment, les risques et les mesures d’intervention seront revus au besoin si le paysage du risque vient à changer au cours de l’exercice.
Confrontés à l’incertitude et à la volatilité continues, ainsi qu’à des attentes visant à garantir des opérations sûres et saines, nous n’avons pas d’autre choix que de nous adapter. Cela comprend la rapidité d’exécution et la portée de nos ajustements pour tenter de demeurer à l’avant-garde en matière de risques.
Notre réorganisation visait, entre autres, le regroupement de nos secteurs de surveillance, comme mon collègue Ben Gully l’expliquera dans quelques minutes. Nous avons aussi redéfini l’ordre de priorité de nos travaux de surveillance et de réglementation selon ce qui est urgent et important. Les changements climatiques, la numérisation, le cyberrisque et la norme IFRS 17 sont des enjeux qui me viennent à l’esprit pour le secteur de l’assurance, et ils seront abordés aujourd’hui.
Climat
J’ai récemment pris la parole lors d’un événement organisé par l’Association pour l’investissement responsable et j’éviterai de me répéter ici. Les changements climatiques sont un enjeu que les investisseurs du secteur privé et de nombreux autres acteurs du milieu ont remarqué, et ils exigent que l’on porte une attention accrue aux risques climatiques dans les institutions où ils investissent. Même si le BSIF n’est pas le seul responsable de la gestion des changements climatiques, j’espère qu’il est évident qu’il travaille de façon sérieuse et urgente à l’élaboration d’un cadre efficace de réglementation et de surveillance pour la gestion et la communication du risque climatique. Le secteur de l’assurance possède des compétences pratiques et de l’expérience pour faire avancer les choses dans l’ensemble du secteur financier en ce qui concerne la gestion du risque climatique.
Numérisation
Les assureurs adoptent de plus en plus le numérique : ils ont modifié leurs modèles d’affaires et leur prestation de services. Cela a permis de réaliser des gains d’efficience et de répondre aux attentes des actionnaires et des souscripteurs. Par contre, dans certains cas, l’adaptation du cadre réglementaire et des contrats n’a pas suivi la cadence des innovations.
Nous actualisons nos processus de surveillance et de réglementation pour refléter ces risques, et vos commentaires nous aident à calibrer nos attentes en matière de protection et d’innovation. Parmi les mesures que nous prenons, mentionnons la création d’une nouvelle division au BSIF, consacrée à tout ce qui touche le numérique, y compris des sujets comme l’assurance ouverte, les données ouvertes et la cryptographie à l’échelle du secteur de l’assurance et du secteur financier en général.
Le recours accru à des fournisseurs tiers, les risques accrus d’une cyberattaque importante et, plus généralement, les innovations numériques transforment la nature des services financiers. Ces changements entraînent une augmentation des risques opérationnels, de conformité, d’atteinte à la réputation et financiers.
L’ampleur de l’adoption de la technologie s’étend à l’ensemble de l’économie et de la société. Il n’y a aucun doute que le nombre de perturbations numériques ira en augmentant dans l’avenir. Il serait plus facile de tenter de résister au changement, mais ceux qui résisteront risquent d’être laissés pour compte plutôt que d’accroître leur résilience.
Nos efforts de modernisation interne prévus et nos consultations externes sur ce nouvel avenir tiennent compte de la nécessité de cette transformation et du contexte des risques et des efforts en dehors des limites traditionnelles. Nous avons lancé des consultations relativement à notre ligne directrice actualisée sur la gestion du risque lié aux tiers (ligne directrice B-10 révisée), nous revoyons les commentaires et nos réponses suivant nos consultations sur la gestion du risque lié aux technologies et du cyberrisque (version à l’étude de la ligne directrice B-13), et nous prévoyons lancer des consultations sur les lignes directrices sur la gestion du risque lié à la culture et la résilience opérationnelle (ligne directrice E-21 révisée) cet automne.
À l’approche d’étapes charnières, nous réfléchissons à la suite des choses pour notre cadre de réglementation et de surveillance. Nous continuerons de prendre le pouls du secteur et d’échanger avec lui pour nous assurer que nos attentes demeurent appropriées et adaptées à l’objectif.
Norme IFRS 17
La valeur et l’ampleur de nos exercices de consultation du secteur sont évidentes à la lumière de notre approche à l’égard de la norme IFRS 17.
La norme IFRS 17 est un effort international visant à introduire des mesures comptables plus cohérentes, comparables et transparentes relativement aux contrats d’assurance. Le passage à cette nouvelle norme représente une tâche colossale pour les assureurs, car il s’agit du changement le plus important apporté aux exigences comptables applicables à l’assurance en plus de 20 ans. Sa mise en œuvre occupera passablement les assureurs, car ils devront modifier leurs pratiques comptables, actuarielles et de production de rapports, de même que leurs systèmes de soutien et pratiques connexes.
Peu après la première publication de la norme IFRS 17 en juin 2017, nous avons entrepris un exercice pluriannuel visant à mettre à jour nos tests de capital, nos consignes, nos exigences en matière de déclaration et nos attentes en matière de surveillance, afin de faciliter une mise en œuvre robuste de la norme. Nous avons travaillé avec le secteur pour créer des solutions adaptées au contexte canadien préalablement à la date d’adoption à l’échelle mondiale qui était fixée au 1er janvier 2023.
Nous avons mené de vastes consultations auprès des assureurs, d’autres acteurs du milieu et des organismes de réglementation.
- Pour mettre à jour nos tests de capital, nous avons effectué trois études d’impact quantitatives, de multiples appels de données, des mises à jour écrites, et nous avons discuté avec les assureurs. Tous les commentaires reçus ont été considérés et nous ont aidés à publier la version finale des lignes directrices sur le capital.
- Depuis deux ans, nous collaborons avec les différents acteurs du milieu, pour nous assurer qu’ils sont prêts, nous leur demandons régulièrement des comptes rendus des progrès réalisés (c’est‑à‑dire des rapports aux six mois). Les progrès sont là et les instances sectorielles nous ont démontré un niveau élevé de préparation.
- Nous menons un contrôle de l’état de préparation à la transition avec les assureurs afin de les aider à peaufiner leurs systèmes et à faire rapport au BSIF avant la date de mise en œuvre.
Nous avons réussi à adapter nos tests de capital, nos autres lignes directrices et nos relevés réglementaires en fonction des nouvelles règles comptables. Cela est le résultat d’un travail énorme au BSIF et de vastes consultations avec le secteur. Les mises à jour reflètent les nouveaux renseignements disponibles en vertu de la norme IFRS 17.
Aujourd’hui, le secteur canadien des assurances est bien capitalisé en vertu des règles comptables en vigueur, et la mise en œuvre de la norme IFRS 17 ne changera rien à cela. Puisque l’IFRS 17 est une nouvelle norme et que nous continuons de traverser une longue période d’incertitude économique, nous pensons que les assureurs agiront prudemment lorsqu’ils prendront des décisions susceptibles d’entraîner des changements dans leurs niveaux de capital.
Dans le cadre de notre approche prudente relativement aux tests de suffisance du capital des sociétés d’assurance, aux relevés réglementaires, à la communication de renseignements et aux lignes directrices, nous continuons de respecter notre engagement de protéger les droits et les intérêts des souscripteurs et des créanciers canadiens et de contribuer à accroître la confiance du public envers le système financier canadien.
Conformément à nos pratiques établies, après la mise en œuvre de la norme IFRS 17, nous continuerons de surveiller l’efficacité de nos lignes directrices pour nous assurer qu’elles demeurent adaptées à l’objectif. Toute amélioration sera apportée de manière transparente et en consultation avec les intervenants externes.
Quand et où les risques augmentent, nous avons tous l’obligation d’y faire face. La cadence du changement au niveau du paysage du risque s’accélère; le BSIF doit réagir lorsqu’il le juge nécessaire.
Nous devons travailler ensemble. Les consultations auprès du secteur jouent un rôle important dans l’amélioration de l’efficacité et de l’efficience du cadre de surveillance. Sans la participation du secteur, les attentes qui en découlent ne seront ni raisonnables ni ciblées.
C’est lors de séances comme celle-ci que nous pouvons échanger sur les risques et les objectifs, et je suis ravi des améliorations qui résulteront de ce niveau d’engagement.
Allocution de Ben Gully, surintendant adjoint, Secteur de la surveillance
« Un secteur de la surveillance intégré »
Merci Peter. Je suis ravi de prendre part à la première séance d’information sur la gestion du risque s’adressant à la fois aux assureurs vie et aux assureurs multirisques. Je vous parlerai de notre Secteur de la surveillance intégré.
Depuis le 1er avril, je supervise le nouveau Secteur de la surveillance responsable des trois secteurs réglementés du BSIF. Ce changement s’appuie sur le statut du BSIF à titre d’organisme de réglementation intégré et reflète le fait que bon nombre des risques pesant sur le système financier ne font aucune distinction claire entre les banques, les assureurs ou les régimes de retraite privés.
Les risques convergent à l’intérieur et à l’extérieur du secteur de l’assurance et, globalement, d’un service financier à l’autre. Les risques liés aux technologies, à la cybersécurité, aux tiers, au climat et à la géopolitique sont tous dans la mire des institutions. En adoptant une approche de surveillance intégrée, la surveillance des sociétés d’assurance bénéficiera d’une vision plus large.
Bien que la transformation porte sur notre structure et notre façon d’examiner les risques, nous continuerons d’effectuer des évaluations adaptées à chaque secteur.
Le Secteur de la surveillance du BSIF entreprendra trois changements stratégiques tout en continuant de réaliser le mandat du BSIF. Ainsi, sa priorité demeurera l’application de saines normes en matière de capital, de liquidité et de financement pour les entités réglementées, ainsi qu’une réaction rapide devant les risques.
Notre premier chantier : l’amélioration des évaluations du risque et des interventions. Nous raffinerons nos analyses et nos activités de suivi en simplifiant et en rationalisant les évaluations des risques, en misant sur l’analytique du risque et l’automatisation pour dégager du temps pour les surveillants, et en mettant davantage l’accent sur un sous-ensemble de résultats précis en matière de surveillance pour mieux orienter les communications avec les entités réglementées et, au besoin, les interventions. Notre objectif ici est de nous concentrer sur les risques importants dans le contexte des différents secteurs réglementés. Par exemple, nous savons que pour les assureurs, les risques se manifestent sur des périodes différentes par rapport au secteur bancaire.
Ce sont le capital et la gestion du capital qui retiendront grandement ici notre attention. Le capital est essentiel à la résilience financière et globale, car il permet d’absorber des pertes imprévues et donne le temps voulu pour remédier aux problèmes. Dans le cadre de notre nouvelle structure, des spécialistes du capital se joindront au Centre consultatif sur le risque, lequel est chapeauté par le Secteur de la surveillance. Ils pourront donc appuyer nos évaluations de la résilience financière et de la gestion du capital. Les actuaires aussi jouent un rôle important dans l’ensemble des secteurs réglementés, et ils continueront de le faire au BSIF dans le cadre des activités du Centre consultatif sur le risque.
Notre deuxième chantier : la transformation des méthodes, des normes et des contrôles. Nous ajouterons de nouveaux outils et des contrôles d’assurance à notre arsenal de surveillance. Nous ferons évoluer nos pratiques de surveillance au moyen des meilleurs outils qui soient vu le contexte de risque en changement et la transformation rapide du secteur des services financiers. Cela impliquera des investissements supplémentaires dans des mesures d’assurance de la qualité et une supervision réglementaire plus intensive. Notre but est de renforcer notre capacité à utiliser à fond les données que nous avons et de réaliser des gains d’efficience dans l’évaluation des risques et l’application d’une surveillance plus atténuée à l’appui d’une saine gestion du risque dans les institutions.
Notre troisième chantier : l’amélioration de nos capacités collectives en matière de surveillance. Nous mettons sur pied une unité spécialisée, l’Institut de surveillance. Son mandat est double : promouvoir des occasions d’apprentissage et de perfectionnement plus formelles pour le personnel de surveillance et faire progresser l’automatisation, la littératie numérique et l’efficacité globale du processus d’examen de surveillance grâce à la création d’un incubateur des technologies liées à la surveillance. Il s’agit d’enjeux décisifs dans le contexte actuel, et bien des personnes qui assistent à la séance aujourd’hui font probablement de même au sein de leur organisme.
Je crois que ces changements stratégiques sont essentiels pour répondre aux impératifs de l’avenir et exploiter au mieux les possibilités énoncées dans le Plan directeur de transformation du BSIF.
Vous vous demandez sans doute « pourquoi le BSIF prend ces mesures maintenant »? C’est très simple. Nous croyons que les dernières années ont radicalement redéfini l’éventail des scénarios « graves mais plausibles » auxquels les entités sous notre surveillance peuvent s’attendre. Deux des exemples les plus frappants sont, bien entendu, la pandémie de Covid – les pandémies de cette ampleur ne surviennent qu’une fois par siècle – et la guerre en Europe – il s’agit du premier conflit de cette envergure depuis la Seconde Guerre mondiale.
Pour nous, il est clair que le BSIF doit évoluer pour relever les défis de cette « nouvelle normalité », où les nouveautés qui apparaissent à l’extérieur du système financier réglementé donnent lieu à un contexte de risque beaucoup plus complexe et en constante évolution. À cela s’ajoutent une incertitude, une complexité et une interdépendance accrues.
Si nous ne pouvons prédire à quel trimestre le prochain événement extraordinaire pourrait se produire, à quoi il ressemblera ou quelles seront exactement ses effets sur le système financier canadien, nous savons ce qui peut en atténuer la gravité et l’incidence : une solide gestion des risques de la part des conseils d’administration et des cadres supérieurs des assureurs (ou des succursales), et une saine surveillance de la part du BSIF.
C’est dans l’optique de ce renouvellement de la fonction de surveillance que nous transformons notre Cadre de surveillance. Il pourra alors nous fournir les outils, la structure et les compétences nécessaires pour aider les surveillants à se concentrer sur le risque prudentiel et son atténuation. Il les amènera aussi à collaborer avec les institutions pour maintenir une posture agile en vue de minimiser autant que possible l’incidence du prochain événement extraordinaire.
Ces changements se traduiront par un Cadre de surveillance qui reflète mieux l’évaluation des risques financiers et non financiers et de la résilience globale des entités réglementées. De plus, afin de tenir compte de l’évolution du contexte du risque, le Cadre de surveillance permettra une plus grande propension à prendre des risques en contrepartie de l’application de mesures correctives au besoin.
La transformation que nous avons entreprise s’arrime à l’orientation que nous voulons donner à notre organisme, c’est-à-dire miser sur des relations plus étroites avec le secteur financier et nos partenaires, un processus décisionnel plus cohérent, fondé sur les risques et des données probantes, ainsi que sur une approche plus réceptive et novatrice en matière de surveillance.
Certains pourraient penser que le centre de gravité de la surveillance se déplace vers le secteur bancaire. Pourtant, notre transformation nous amène à une approche plus horizontale qui reconnaît la valeur de la diversité des points de vue et garantit que les perspectives en matière d’assurance soient prises en compte dans l’ensemble de notre structure.
En trouvant un meilleur équilibre entre nos lignes directrices et nos attentes, nous réussirons à mieux mobiliser les intervenants. Dans le cadre du nouveau modèle, les relations avec les associations sectorielles et les assureurs demeurent très importantes. Nous avons besoin du concours du secteur pour que nos travaux soient effectivement axés sur notre mandat, tout en permettant aux institutions financières d’être concurrentielles et de prendre des risques raisonnables.
Nous sommes déterminés à bien faire les choses et à créer un organisme capable d’aider le système financier canadien à relever les défis que l’avenir nous réserve.
Voilà qui conclut mon exposé. Merci.